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RWC 2011 : France – NZ : Une belle défaite par 8 à 7

L’histoire était donc écrite : 24 ans après, les Blacks, meilleure nation rugbystique de tous les temps a enfin regagné ce trophée, rejoignant ainsi dans la légende les australiens et sud-africains, déjà double vainqueurs de l’épreuve.

Bravo à eux, bravo à ce peuple imprégné d’ovalie et ces mythiques All Blacks qui ont enthousiasmé à un moment ou un autre tous les passionnés de ce sport au travers le monde. Mais oui, cette victoire, si elle est méritée sur la compétition, si elle est justice depuis ces quatre dernières années, elle  nous laissera un léger goût amer. Un sentiment bizarre, un curieux mélange de tristesse, déception, frustration mais aussi de fierté et de soulagement de ne pas avoir pris la fessée que beaucoup promettaient…

Nos bleus n’ont jamais été si proches du trophée William Webb Ellis. Ils l’ont effleuré mais n’ont pu concrétiser ce souhait. Admirables de solidarité, d’abnégation, de courage les français ont su faire douter cette machine Black. Dès le Haka en se positionnant fièrement, main dans la main face à ce rite maori. Unis pour former le V de la victoire avançant vers ces néo-zélandais, avides de titre, poussés et soutenus par tout un peuple. Dusautoir et ses potes se sont dressés là, courageusement devant ces gaillards, leur faisant bien comprendre qu’il restait un match à jouer et qu’ils étaient prêts à tout donner eux aussi pour décrocher le graal. Que ce moment fut beau !! Quelle fierté d’être français ! 

Le ton était donné et les premières minutes confirmaient cette farouche volonté de nos joueurs. Guerriers, batailleurs mais aussi joueurs, ils démontraient au monde entier que cette place de finaliste n’était en rien usurpée.

La première faille était cependant trouvée par les All Blacks. Après deux échecs au pied de Weepu, lui aussi rattrapé par la pression (pas la même que la nôtre consommée dans les pubs et autres foyers..), les avants néo-zed ouvraient le score suite à une touche et un « peel-off » qui a dû plaire à Daniel Dubroca, l’un des capitaines français à avoir gagné à l’Eden Park et spécialiste de ce genre d’exercice. Une action qui consiste à voir un avant se placer en relayeur du preneur en touche pour contourner l’alignement ou venir en son cœur. C’est ce qu’a fait le pilier « noir », Woodcock,  qui s’enfonçait telle une lame de couteau dans la défense frenchie. Le stade exultait, le monde se réjouissait du sort de ces vilains français et l’hexagone doutait. D’autant que le chouchou de ces dames (et de Liévremont aux dires de certaines mauvaises langues…), Parra se faisait gentiment lynché par le genou « innocent » du capitaine noir, Richie McCaw. Le pauvre Morgan ne s’en remettait pas et laissait sa place au traditionnel Trinh-Duc. Un mal pour un bien ? On pouvait le penser après les premières foulées du montpelliérain qui démontrait son envie de rattraper le temps perdu. Une cuillère le cueillait de justesse alors qu’il venait de déchirer le rideau noir. La révolte était lancée mais la pause survenait sur ce mince avantage pour les locaux.

La seconde période était plus que jamais indécise d’autant que nos bleus occupaient le camp adverse. Yachvili échouait d’un cheveu sur une tentative de pénalité après que Trinh-Duc ait passé le cuir à droite sur un drop judicieusement tapé. Les vaillants gaulois allaient ils résister au monde entier ? Pas sûr, car Donald (le cousin du canard sans doute) donnait de l’air aux siens sur une rare incartade dans nos bases. La dernière demi-heure fut une démonstration française. Forts dans l’alignement, irrésistibles en défense, volontaires et habiles dans les percussions, les blancs faisaient douter, vaciller le monstre vêtu de noir ! L’Eden Park médusé, laissait entendre les cris supporters français pourtant noyés dans la masse noire. Nous existions ! Mieux, nous récitions une leçon de rugby. Mc Caw et ses hommes s’arcboutaient, pliaient et finissaient par rompre après une action « made in France » et des temps de jeu sur toute la largeur du terrain. A l’arrivée, l’omniprésent Rougerie servait son capitaine pour aller en terre promise sous les poteaux. Magique, comme la prestation de Dusautoir, capitaine exemplaire qui surclassait son homologue Black. 8 à 7 et il restait 20 minutes à jouer. L’affaire était bien engagée pensait-on aux 4 coins de l’hexagone. Oui, mais c’était sans compter sur la « bienveillance» de Mister Joubert. L’arbitre sud-africain de la rencontre qui avait déjà été plus que limite lors de la demie gagnée par les Néo-zélandais contre l’Australie, se contentait de regarder la prestation de nos joueurs. Certains diront après que l’arbitre avait été impartial sifflant quasiment autant de pénalités de chaque côté. C’est vrai, il était très laxiste et ne prêtait aucune attention aux placages hauts adverses et encore moins aux hors-jeu systématiques des locaux, bien emmenée dans ce registre par Mc Caw. Du grand art ! Comme je l’avais déjà évoqué, notre salut devait passer par le jeu. Oui, mais encore faut il avoir des ballons. La redistribution des cartes était à sens unique et les Blacks bénéficiaient des permissions du « referee » pour faire tourner le chrono sans concéder de pénalités. Tout juste peut on signaler ce cadeau offert à Trinh-duc à 50 mètres des poteaux adverses sur une des rares mêlées sifflées en notre faveur. Une occasion unique que notre ouvreur ne pouvait convertir. Notre chance était passée. Il ne fallait pas escompter une autre fleur du sud-africain qui ne pouvait mettre sa carrière en danger (pour rappel, celui qui juge et désigne les arbitres est Mr Pad O’Brien, néo-zélandais de naissance et qui attendait le sacre des siens comme toute la nation au long nuage blanc).

La défense Black faisait bonne garde, pouvait se positionner un peu partout sur les rucks avec l’assentiment de l’homme en jaune. Les piliers locaux pouvaient se mettre à genou sous la poussée tricolore, rien n’y faisait.

Au coup de sifflet final, la détresse s’emparait des blancs, alors que les noirs exultaient. Le coup de pouce du destin n’était pas là. Après l’injustice du sport une semaine avant (je rappelle que nous n’avons rien volé aux gallois, ils se le sont perdus tout seuls leur demie…), l’injustice des hommes avait cette fois frappé. Dur mais la dignité des perdants était belle et sans doute la meilleure réponse.

Une aventure se termine. Certains joueurs ne reporteront plus jamais la tunique tricolore alors que d’autres pourront se servir de ces merveilleux moments pour aller glaner quelques trophées à l’avenir. Pour ma part, je donne un grand coup de chapeau à ces joueurs qui ont su avancer dans l’adversité mais aussi à leur chef, le controversé Marc Liévremont. Souvent attaqué, décrié, ce mec est toujours resté droit dans ces bottes allant au bout de ces rêves, de ces projets pour échouer d’un rien là ou aucun autre de ses prédécesseurs n’est parvenu. Merci Marco et Bravo pour l’ensemble de ton œuvre pendant 4 ans.

Pour être complet, j’ajouterai que l’Australie finit à la 3e place devant de beaux gallois. Le classement des 4 premiers est donc le même qu’en 1987. 87, 8 et 7 comme le score de cette finale. Joli clin d’œil de l’histoire.